Du prétoire au Calvaire
Jean qui s'était lui aussi enfui, affolé, lorsque Jésus fut transféré chez Caïphe, s'est ensuite ressaisi et se rendit au Prétoire, parmi la foule. Dès l'annonce de la condamnation il se précipite au Cénacle pour prévenir Marie884. Il est alors 10h30 selon Maria Valtorta. Arrivé sur les lieux, son courage faiblit, et il se prosterne en prière dans la salle de la Cène : « Oh ! Dieu Très-Haut, aide-moi ! Aide-moi à le dire à la Mère ! Je n'en ai pas le courage !… Et pourtant je dois le dire. C'est moi qui dois le dire puisque je suis resté seul ! »607.1. Marie, qui est restée toute la nuit en union spirituelle avec son Fils, redonne courage à Jean. « Oh ! Dieu, donne-moi la force ! Lui doit me voir. Je ne dois pas sentir ma douleur tant que Lui sent la sienne. (...) Avertis ta mère, Jean, et les autres femmes. Et allons »607.4. Pendant ce temps les dispositions ont été prises au Prétoire, et les condamnés sont chargés de leur croix. « Je vois une vraie croix bien formée, solide,avec les bras parfaitement encastrés dans la pièce principale et bien renforcée par des clous et des boulons885 » insiste Maria Valtorta, tout en se remémorant avoir lu jadis « que la croix fut formée en haut du Golgotha »608.2. De la description qu'elle donne de la Croix (4 à 5 m de long) on peut en déduire que Pilate avait opté pour la crux sublimis, plus infamante encore que la crux humilis moins haute, réservée aux prisonniers de droit commun. Un simple calcul de physique montre qu'une croix en conifère d'environ 4m50 par 2m20 et d'une section de 15 par 18 cm886, représente sur l'épaule une charge comprise entre 60 et 72 kg.
« Jésus avance haletant. Chaque trou de la route est un piège pour son pied qui vacille et une torture pour ses épaules écorchées, pour sa tête couronnée d'épines sur laquelle descend à pic un soleil exagérément chaud qui de temps à autre se cache derrière un rideau de nuages de plomb »608.4, observe la mystique. Le centurion Longin dirige ses troupes. Craignant que la faiblesse évidente de Condamné ne Lui permette pas d'atteindre le Golgotha, il abrège le parcours à travers la ville, au grand dam de la foule. Jésus bute une première fois à l'approche de la porte Judiciaire. « Jésus éprouve donc une douleur aiguë dans la montée et avec le poids de la croix qui, longue comme elle est, doit être très lourde »608.5. Jésus bute et tombe sur le genou droit, puis à nouveau sur les deux genoux. Ses dernières forces L'abandonnent, et sa marche est chancelante. Longin ordonne une brève halte. Mais à peine a-t-il donné l'ordre de reprendre la marche que Jésus, victime d'une syncope, chute brutalement pour la troisième fois. La rencontre avec les femmes disciples, à mi-hauteur du Golgotha, est rendue possible par la présence de Plautina, « cette grande matrone certainement influente puisque l'officier de Longin lui obéit »887. Dans ce groupe d'une douzaine de femmes(Lc 23, 27-31) où se trouvent Jeanne de Chouza et les romaines, Nike888 s'approche de Jésus : « la femme pleine de pitié l'aide. (...) Jésus presse le linge frais sur son pauvre visage »608.9. (Voir plus loin le paragraphe consacré au voile de Véronique).
La marche reprend, et Jésus titube d'avantage à chaque pas. La foule veut en finir et s'agite : « Vite ! Demain c'est Pâque. Il faut tout finir avant le soir ! »608.12(Jn 19, 31). L'autre groupe des saintes femmes, venu du Cénacle avec Jean et Marie, attend le passage du Sauveur. A proximité se trouve la charrette de Simon de Cyrène et de ses deux fils (Mc 15, 20-21). Pendant que Longin réquisitionne le cyrénéen pour porter la Croix, Jésus, épuisé, aperçoit sa Mère. « Maman ! ». (...) « Marie porte la main à son cœur comme si elle avait reçu un coup de poignard et vacille légèrement »608.13. Cette rencontre poignante ne figure pas dans les évangiles, mais ce fait est transmis par la tradition, sur l'autorité de saint Anselme et de saint Boniface. Le premier assure que le Christ salua sa Mère par ces mots : « Salve, Mater ! » Car, dit-il « dans cette parole, il y a la confession de tout et de toute sa terrible douleur de l'esprit, du moral et de la chair ». Le second affirme que la Vierge tomba comme demi-morte et qu'elle ne put prononcer un seul mot (« Nec verbum dicere potuit »). Exactement comme le décrit Maria Valtorta.
« Maintenant, derrière Jésus, marche le Cyrénéen avec la croix889 »608.14. Ils atteignent enfin le sommet. Jeanne de Chouza s'approche de Longin, et lui remet une amphore et une bourse. Les romaines ne sont plus là. Ensuite(en MV 612.19)on apprend qu'elles ont accompagné Nike qui voulut mettre à l'abri son précieux voile, craignant que la foule déchainée ne le lui arrache.